chronique pré-hivernale

Publié le par commun

Le froid s’est installé. Il pique la ville et ma peau à travers mon jean. Le ciel se rapproche de plus en plus du sommets des condos, il s’apprête à déverser sur nos têtes de la neige fraîche.

Troisième saison, troisième couleur, depuis notre arrivée. Après le bleu, puis l’orange, voici le gris qui précède le blanc. Les gens, comme des souris, se réfugient dans les galeries, protection chaude, ventre de Montréal. La ville souterraine où grouillent des milliers d’êtres, petites pattes allongées, regards fixes, regorge de points de ravitaillement, des places entières non pas dédiées au plaisir de la bonne chère rabelaisienne, mais affectées uniquement au remplissage de panses. On ne s’entend pas parler dans ce dédale de voix extraterrestres, les messages sont codés, prennent possession de tout l’espace, s’abreuvent de coca light et s’alimentent de sous-marins subway, de cheese-burgers de Burger King et de barquettes sous vide du Sushi Bar Sayamamoto. Il n’y a qu’à tendre la main pour magasiner, tout est là à profusion, Bureau en Gros flirte avec un Body Shope et la librairie Chapters avec le Pharmaprix, dégoulinant de crèmes pour les mains, les pieds, la tête, alouette !

 

 

 

 

Le français essaie de se frayer un passage entre les interstices de l’anglais. Il se bat, résiste, tempête parfois. En tout cas, les petites souris québécoise s’agitent pour que leur langue ne soit pas avalée par les bouches des anglophones, véritables carnivores, dévoreurs de mots frenchy. Les débats sur la langue sont légions, à toute heure de la journée, dans le métro, au boulot, au Second Cup, Rue Sainte-Catherine entre deux feux qui égrènent les secondes, temps autorisé avant de se faire aplatir par un char en furie, conduit par un Montréalais particulièrement nerveux.

 

 

 

 

Parallèlement à la nervosité de la ville, au rythme fou d’une métropole, des parcelles sont préservées de la ruée vers l’argent. Les avenues, rues étroites comparées aux chemins, se sont parées de tentes blanches qui attendent les premiers flocons et le froid glacial qui paralysera les chars. Ces bâches en plastique s’alignent sur des kilomètres, telles un campement militaire abritant une armée d’employés impatients, après des mois d’attente, d’entrée en guerre contre l’ennemi, l’hiver.

 

 

 

 

Les parcs ont expulsés les enfants qui jouaient autrefois. A la place, des toboggans et balançoires, on y trouve des fortifications en bois qui, paraît-il, donneront naissance à des patinoires. Je demande à voir.

Publié dans vie à Montréal

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